Olivier Le Poittevin met le (handi)cap sur la Mini Transat

Olivier Le Poittevin à bord du Mini 6.50 aux couleurs de l'association Des Pieds et Des Mains

Publié le samedi 20 septembre 2025

Le skippeur du Mini 6.50 Des Pieds et Des Mains prend aujourd'hui le départ de La Boulangère - Mini Transat, une épreuve mythique de la course au large. L'aventure d'une vie pour celui qui va traverser seul l'Atlantique, mais avec un océan d'espoir dans son sillage, celui de millions de personnes en situation de handicap, bien décidées à faire changer le regard sur la différence. Quelques heures avant de quitter le ponton, il a répondu à nos questions. Entretien, à cœur ouvert.

Olivier, tu t'apprêtes à prendre le départ de la Mini Transat, la course de tes rêves. Dans quel état d'esprit es-tu ?
"Je me sens prêt, assez serein, concentré. Il y a évidemment un peu d'appréhension, une certaine pression aussi, mais je la gère pour l'instant plutôt bien. C'est un stress positif. J'ai commencé à vraiment rentrer dans ma course depuis quelques jours. Les conditions météo assez fortes qui sont annoncées m'ont fait me projeter un peu. J'ai commencé à visualiser ma course, mes manœuvres, mes choix de voile et de trajectoire. Mais ça me fait du bien, c'est quelque chose dont j'avais besoin. Je suis passé en mode course."

Olivier va vivre sa toute première traversée de l'Atlantique en solitaire. © Orana Larthomas / Maï Moana
 

Le début de course promet d'être tonique, voire engagé. Quelles sont les conditions météo que vous allez rencontrer ?
"Le parcours a été un peu modifié par l'organisation pour nous éviter de prendre trop cher dans le Golfe de Gascogne. Lors du briefing météo vendredi, on nous a dit qu'on était à la limite du report du départ, en raison de l'approche d'une dépression orageuse. On a une mer assez forte qui n'est pas dans le sens du vent, qui est lui-même soutenu. Pour ces raisons, la direction de course nous fait finalement partir plus au nord-ouest, avec une marque de parcours à enrouler au large du Finistère sud. Cela va nous permettre de contourner le système et limiter les effets de cette mer courte et formée, qui peut être casse bateau."

Malgré tout, as-tu réussi à profiter de l'ambiance du départ ?
"Oui, j'ai réussi à vivre le moment présent sans trop penser à ce qui m'attend, même si ça reste forcément dans un coin de ma tête. Hier, il y avait plein de monde sur le village, des médias, ma famille, les bénévoles de l'association, les salariés de la fondation… Ça m'a fait du bien, ça m'a vraiment détendu."

L'homme est donc prêt. Et le bateau, comment va-t-il ?
"Il est nickel ! Je crois que, comme moi, il n'a jamais été aussi prêt. C'est la première régate où je suis autant en confiance avec lui. J'ai même fait des choses qui n'étaient pas fondamentales, mais qui vont améliorer mon confort à bord. J'ai eu du temps pour bien le préparer, le mettre en configuration transat. Maintenant l'objectif est clair : ne pas casser, le faire glisser correctement, pour aller au bout de l'aventure avec lui.

Olivier a profité des dix jours de présence sur le village départ de la course pour peaufiner les derniers détails à bord. © Anne Beaugé
 

Au-delà du défi sportif, tu vas emporter plein de monde dans ton sillage et porter un beau message. Qu'est-ce que ça représente pour toi ?
"Une chance immense ! J'ai eu le bonheur de rencontrer de nombreuses personnes en situation de handicap tout au long de ce projet. Je vais puiser ma force en eux. Je pense notamment à ceux avec qui j'ai navigué en double handivalide : Mathieu, le secrétaire de l'association, qui m'a accompagné lors de sorties en mer ; Gauthier, l'une des jeunes pousses Des Pieds et Des Mains, avec qui on a réalisé une belle perf' sur la Calvados Cup ; Nathan qui m'a aidé à convoyer le bateau jusqu'aux Sables d'Olonne… Quand je les vois se débrouiller, s'adapter à leur handicap sur le bateau, ça me donne beaucoup de courage et me fait relativiser certaines situations en mer. Je n'oublie pas non plus toutes les autres personnes avec qui j'ai vécu des moments très forts. Dans les moments difficiles, je vais penser à eux. Ne pas me plaindre, continuer à avancer, quels que soient les obstacles que je vais rencontrer. Ça sera ma devise à bord."

Il y a eu notamment la rencontre, cette semaine, avec des jeunes de l'IME La Guérinière aux Sables d'Olonne. Tu es allé leur rendre visite mardi, avant qu'ils embarquent sur ton bateau vendredi…
"C'était un super moment ! J'ai pu découvrir leur environnement, leur quotidien au sein de cet établissement spécialisé. Les échanges n'étaient pas très faciles au début, ils étaient un peu dans leur bulle, alors j'avais du mal à instaurer un échange, mais cela a permis de briser la glace en quelque sorte, avant donc que je les accueille à bord. Et là c'était magique ! Ils étaient super contents de voir le bateau, m'ont posé plein de questions et ont dessiné partout dans le cockpit. Ils avaient le sourire, j'ai eu des câlins… Ils étaient vraiment adorables et ils m'ont donné une énergie incroyable ! J'ai trouvé ça très émouvant."

Anh, jeune pousse de l'association, a eu le bonheur de visiter le Mini 6.50 Des Pieds et Des Mains avec Olivier, avant le départ de la PLM, début avril à Lorient. © Thomas Deregnieaux / Qaptur
 

Ce sont ces sourires, ces regards, ces émotions, ces mots, que tu vas emporter avec toi… 
"Tout ça, oui ! Le jour où j'aurai un coup de moins bien, je repenserai par exemple à Sarah, une petite en fauteuil roulant qu'on a fait monter hier sur le bateau. Elle était aux anges, elle avait les yeux qui brillaient. Elle m'a fait un très joli dessin, comme tous ses camarades. Grâce à eux, j'ai fait le plein de bonnes ondes à bord. Elles vont rester à bord et m'accompagner durant ce long et beau voyage."

Pour finir, tu souhaites peut-être transmettre un message à l'association Des Pieds et Des Mains, à la Fondation OCIRP et à tous ces gens qui te suivent et te soutiennent ?
"Que dire… C'est émouvant de penser à eux. Merci du fond du cœur de me permettre de vivre tout ça. J'ai beaucoup de chance, je m'en rends encore plus compte aujourd'hui. Un grand merci et un immense bravo pour tout ce que vous faites au quotidien autour du handicap et de la vulnérabilité. Ce projet a connu des hauts et des bas, mais l'association et la fondation ont gardé le cap pour finalement m'en confier la barre. Je vais tout faire pour en être à la hauteur et porter ce beau message de l'autre côté de l'Atlantique. L'objectif est évidemment de ne pas casser, mais surtout de contribuer, à mon échelle, à faire changer le regard sur le handicap."

Decouvrez le portrait d'Olivier en vidéo :

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